Retranscription de l’interview avec Stéphane Raynaud :
Quelles sont les conséquences du report de la facture électronique sur l’écosystème ?
Il y a plusieurs impacts du report de la facture électronique.
Le 1er impact, c’est que les cabinets peuvent être tentés de faire une pause. Ce n’est à mon avis pas une bonne idée, parce le temps de faire une pause, le marché va évoluer et les conditions au marché de la facture électronique vont évoluer. Donc il vaut mieux continuer à agir.
Le 2ème impact, c’est que certaines plateformes risquent de rencontrer des difficultés en tant qu’opérateurs. Donc il faut avoir en tête qu’il va falloir être sélectifs sur les opérateurs que l’on retient.
Et puis, le 3ème effet du report, c’est qu’il va falloir continuer à digitaliser nos clients dans un contexte où il n’y a pas d’obligation. Donc évidemment, cela demande un effort particulier du cabinet pour le poursuivre.
On parle beaucoup d’Intelligence Artificielle. Quel est l’impact sur la profession ?
L’intelligence artificielle, c’est quelque chose qui va impacter tous les métiers. Mais pour la profession comptable, ça va être particulièrement frappant puisqu’il y a déjà depuis 2023, l’arrivée de Chat GPT dans les cabinets qui commence à être utilisé.
Et puis en 2024, on va avoir notamment Copilot, l’outil Microsoft. Et puis il va y avoir d’autres outils.
En fait, l’intelligence artificielle va s’installer progressivement dans tous les outils qu’on utilise au quotidien : que ce soit dans les outils de bureautique, dans les outils comptables, dans les outils de facturation. Donc l’urgence, c’est de s’habituer à ces outils-là, c’est de pouvoir s’acculturer à l’intelligence artificielle et comprendre que l’on doit apprendre à donner des ordres – des prompts – à l’intelligence artificielle. Et en même temps, il va falloir avoir un regard critique sur les réponses et pouvoir se challenger avec ces outils-là pour les entreprises.
Dans cette période d’incertitude, est-ce qu’il y a un déterminant qui permet tout de même d’avancer ?
Il y a vraiment quelque chose qui va être, à mon avis, un axe de travail important pour l’année 2024 pour les cabinets, c’est de créer, ce qu’on appelle la culture de l’engagement.
Pourquoi ? Parce que, face à des changements technologiques qui sont soudains, comme l’intelligence artificielle, la facture électronique (qui va quand même arriver à un moment donné), plus les autres changements auxquels peuvent être soumis les cabinets (la RSE, les engagements de conformité réglementaire), là, ce qui va être vraiment important, c’est de recréer du collectif.
Pour recréer du collectif, il faut qu’il y ait un engagement du côté des collaborateurs. Aujourd’hui en France, il y a des études qui montrent que seulement 7% des collaborateurs sont vraiment engagés. Ça veut dire qu’il faut créer les conditions, pour réengager un maximum de collaborateurs dans les entreprises, dans les cabinets.
De la même manière, il faut également un nouveau deal entre les associés, une nouvelle règle d’engagement entre associés sur la manière dont on devient associé dans un cabinet et la manière dont on progresse dans son parcours d’association.
Et puis, il faut également un engagement certainement différent du côté des clients, notamment autour des thématiques qui peuvent être la RSE, l’ESG, et également la culture client, le sens du service.
Donc vraiment, la valeur sûre dans des temps incertains comme ceux qu’on est en train de connaître, c’est cette notion d’engagement.
Et on voit que dans plein de pays du monde, c’est quelque chose qui revient de manière très forte. On a des expériences à l’international, comme en Australie, qui montrent que si les cabinets australiens n’ont pas été suffisamment engagés auprès de leurs clients, ils ont pu avoir une baisse du chiffre d’affaires. Pourquoi ? Parce que la digitalisation a forcé les acteurs à se faire un peu la guerre.
Donc vraiment, le thème de l’engagement est au cœur de la réflexion internationale sur les professions comptables. Et ça va être une valeur sûre pour l’année 2024, pour les cabinets.
